Extraits

Extrait du chapitre 1, Tome 1 : Les Ames Nuisibles, Trilogie L'Ame Evolutionnaire 

 

LE RETOUR AUX SOURCES

 

12 octobre 2015, Vientiane, Laos.

  Mon épouse Thavone, d'origine laotienne, se présente chez Soumaly, une jeune femme médium qui pratique le Pee Fah, le culte traditionnel des esprits. Il est 18 heures, et il fait nuit. La maison est une construction à un étage, modeste mais confortable, où Soumaly vit avec ses parents.  Les appartements privés sont au rez-de-chaussée. Thavone est conduite au premier étage, à la salle de prière. Une cérémonie traditionnelle de Van Sinh est prévue ce soir ; il y en a deux par mois, à la Pleine Lune, et à la Lune Nouvelle. Les participants sont déjà installés : une dizaine de femmes du quartier, et un laotien récemment retraité, Koud, qui a passé l'essentiel de sa vie active dans l'Utah.

Thavone est accueillie chaleureusement: on se rappelle qu'elle est un enfant du quartier, bien que sa dernière participation remonte à 1972 ; elle avait 19 ans, et partait pour la France pour de nombreuses années. Avec sa mère, Métou Done, elle était venue demander protection à l'occasion de ce long exil.

 

  Les participants bavardent jusqu'à l'arrivée des officiants, la médium Soumaly, et sa mère, Madame Maÿ. Suit une courte cérémonie, devant l'autel décoré de guirlandes en papier brillant argenté ou doré. On allume quelques bougies, et on présente le plateau à offrandes. La médium attache un bracelet de coton blanc au poignet de chaque participant. Après quoi tout le groupe passe dans la pièce voisine, le salon, et s'assoit au sol sur le tapis.

La conversation reprend, très familière, car la plupart des participants se connaissent bien ; ils viennent régulièrement à ces cérémonies.

  Tout à coup, le silence se fait, et les regards convergent vers la médium, dont l'attitude change: l'esprit vient d'arriver, et prend rapidement possession de son corps. Son maintien, son comportement, sa voix, ses traits même sont affectés, d'une manière subtile, mais sans équivoque. Madame Maÿ, la mère de Soumaly, glisse à l'oreille de Thavone : « C’est Aï Ninh ». (Prononcer A – i – ni – ne).

Nous apprendrons plus tard que Soumaly, au fil des cérémonies, incarne plusieurs esprits différents : le plus assidu est Aï Ninh, un moine bouddhiste ayant vécu au 19ème siècle. Il y a aussi Phra Phrom, le Bouddha aux quatre visages (prononcer Pra Prom), qui est la représentation thaïlandaise du Dieu hindou Brahma. Enfin, il y a Som Deth Loun, un personnage craint à cause de son attitude distante, et son comportement expéditif.

Tous les trois viennent pour répondre aux questions des fidèles, les aider, les conseiller, et résoudre leurs problèmes.

 

  Ce soir-là, il s'agit d'Aï Ninh (Frère Ninh), de son vrai nom Chao Thon Dam. Chao signifie Seigneur ; il était donc membre de la famille royale. On sait qu'il était le neveu de Chao Noÿ, de son vrai nom Ratsavong, roi de Xieng Khouang (l'une des provinces du Laos actuel), décédé en 1829. Aï Ninh est particulièrement apprécié, pour son caractère enjoué, sa patience, et le plaisir évident qu'il prend à ces rencontres. Ce plaisir est partagé: les fidèles s'expriment familièrement, sans contrainte ; il répond sur le même ton, souvent avec une pointe d'humour. La conversation est vive et plaisante. On parle des nombreux problèmes des participants.

  Des problèmes de santé: les douleurs des grands-parents, la fièvre récurrente du dernier né... Des problèmes de couple: le mari travaille au loin et a une maîtresse sur son lieu de travail... Des problèmes d'argent... Des problèmes de comportement: le fils aîné a 18 ans et de mauvaises fréquentations... Des problèmes de choix : « Dois-je accepter ce nouveau travail qu'on me propose ? Puis-je demander un salaire plus élevé?  Mon fils a émigré en Australie, est-ce une bonne idée d'aller vivre avec lui ? »

  La réponse est toujours pertinente, et souvent étonnamment précise : « Non, n'acceptez pas ce travail, il n'est pas fait pour vous ; en plus, cette entreprise n'est pas solide...  Oui, vous pouvez aller en Australie, tout se passera bien ! ».

Nous savons que ces avis sont précieux; nous en avons eu quelques témoignages éclatants, que nous évoquerons plus loin. Ils nous sont apparus fondés, sincères, et motivés par l'intérêt bien compris de la personne concernée.

 

  Thavone était venue avec deux objectifs.

Le premier consistait à témoigner en mémoire de sa mère, Métou Done, décédée quelques mois auparavant. Toute sa vie, Métou avait fréquenté ces réunions, où elle emmenait Thavone, alors enfant, et ses autres filles. Aujourd'hui, 44 ans plus tard, Thavone est de retour.

Aï Ninh la salue chaleureusement dès qu'elle se manifeste :

« Je suis très heureux de vous voir après tout ce temps passé en Occident, et de constater que vous n'avez pas oublié vos racines. Je regrette seulement que d'autres personnes de votre entourage, qui n'ont jamais quitté le pays, n'aient pas jugé bon de venir nous voir, pas même une seule fois ! ».

C'est une allusion directe au comportement des six sœurs de Thavone : elles aussi ont été initiées au Pee Fah jusqu'à l'adolescence; sitôt adultes, elles ont cessé de pratiquer. Cette remarque montre qu'Aï Ninh connaît parfaitement l'histoire familiale. Pourtant, à l'époque de leur enfance, tout était différent: la médium n'était pas Soumaly, mais sa grand-mère, Chanthala ; l'esprit n'était pas Aï Ninh, mais son oncle, Chao Noÿ.

 

  Le deuxième objectif était de consulter Aï Ninh à propos de notre fils Bastien, qui nous pose de sérieux problèmes.

 
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